Franck Thilliez - Fractures

La pluie tombe. Le rideau ainsi formée cache la colère de la jeune femme. Il s'agit d'Alice Dehaene.Elle est en colère parce que tous lui mentent. Son père depuis son enfance lui sert un mensonge sur sa sœur Dorothée, et sa mort supposée. Son psychiatre, lui, ne veut rien lui dire de sa maladie. Il recule toujours le moment des révélations. Et puis, il y a cet étrange individu Birdie qui la hante. Et qui l'effraie. Et ce depuis l'enfance. Devant elle, s'étend un monticule de terre avec une croix portant le nom de sa sœur. Et deux dates. Dans sa main, la phtographie très récente de cette même sœur jumelle. Qui est qui?
Luc Graham est le psychiatre d'Alice. Un homme troublé qui se bat contre son passé, et contre un futur incertain. Alice est en quelque sorte son fil d'Ariane. Ce lien ténu qui le maintient à la surface. Puis, sa collègue Julie ramène cet homme à moitié nu. Et là tout bascule à vitesse grand V. Le passé enfoui de Luc Graham se mêle au présent turbulent d'Alice. Et les dommages collatéraux risquent d'être nombreux.

Fractures est un roman attendu. C'est vrai que Franck est attendu tous les ans. L'automne signifie la chute des feuilles, et la publication du nouveau thriller de M. Thilliez. Il existe des choses comme ça qui restent fixe. Seulement voilà, je lis les romans de cet auteur depuis La chambre des morts. Et à chaque fois, il a réussi à se renouveler. Mais, l'année dernière, l'Anneau de Moebius a mis la barre très haute. Il avait réussi à créer une intrigue complexe sans pour autant perdre le lecteur.
Tout ça pour vous expliquer qu'en ouvrant ce roman, j'étais perplexe. Mais voilà, c'est l'heure. Première page, première scène: un hôpital, une séance de test psychologique. Le Dr Graham envoie des images négatives sur le moniteur de sa patiente, Alice Dehaene. Un choc, Alice se lève et fuit l'hôpital sans dire un mot. Scène suivante: son père se fait poignarder.
Les choses sont mises en place, et la tension commence très haut. Et je vous promets qu'elle ne redescend pas. En effet, Franck Thilliez nous pond un roman de haut niveau. Les personnages sont tous de vrais œuvres. Je m'explique. Alice est un personnage des plus complexes par ces maux psychologiques. Ceux-ci rendent le personnage dur à appréhender, mais facile à perdre les lecteur et l'auteur. Mais là, il arrive à nous bluffer sur toute la ligne. Surtout, Franck revient avec ses premiers amours: un roman collégial. Il l'avait fait avec La chambre des Morts, puis laissé un peu de côté. Là tous les personnages ont leur force et leur intérêt par rapport à l'intrigue générale. Alice, Luc, Julie et le mystérieux homme en état de choc sont des pièces du puzzle. Et les autres personnages secondaires également.

Quand je parlais de ses premiers amours par rapport à La Chambre..., j'ai ressenti cela également par le contexte du roman. L'histoire baigne dans la région du nord et son contexte politico-social. La jungle de Calais, les zones délaissées et rurales ou encore la misère sociale existante.Il nous peint la région du nord comme un région triste mais accueillante. Des gens qui s'entraide et se soutienne. On est charmé, et le décor ressort comme un personnage implicite à part entière. Une réussite sur ce point également.
Finalement, dans ce roman, on quitte le fantastique pour revenir dans le réel. Le réel froid et dur mais le réel le plus basique. La folie des hommes et la souffrance qui en découle sont les deux pièces maîtresse de cet ouvrage bluffant. Mais j'ai quand même une question pour Franck: Te rends-tu compte qu'encore une fois, tu as mis la barre un peu plus haut? Ca va être dur là pour le prochain...